François Berlier de Vauplane

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François Berlier de Vauplane
Le père François Berlier de Vauplane.
Biographie
Naissance
Décès
(à 56 ans)
Versailles
Nationalité
française
Formation
Lettres, philosophie et théologie
Activité
Autres informations
Ordre religieux

François Berlier de Vauplane, né le à Château-Renault et décédé le à Versailles[1], est un prêtre jésuite français et éducateur. Après une conduite héroïque durant la Première Guerre mondiale, il est connu comme recteur de l'école Saint-Louis-de-Gonzague (Paris), de 1930 à 1937, puis de l'école Sainte-Geneviève (Versailles), de 1937 à 1939.

Biographie[modifier | modifier le code]

François nait le à Château-Renault du mariage de Polyeucte Berlier de Vauplane (1846-1920) et de Marie Célestine Marguerite Peltereau (1854-1928), cousine du député René-Armand Peltereau-Villeneuve[2],[3].

Il fait ses études à Saint-Grégoire de Tours et à l'école Sainte-Geneviève de Versailles, dirigée par les pères jésuites. Il s'y préparait aux concours des grandes écoles en vue d'une admission à l'École spéciale militaire de Saint-Cyr, lorsqu'une grave maladie interrompt ses études[4].

Il entre dans la Compagnie de Jésus, alors en exil à Jersey. Il y sera suivi par son jeune cousin germain Hervé Berlier de Vauplane[Note 1]. François est professeur de mathématiques et d'allemand à Marneffe (une autre institution des Jésuites français en exil). Il étudie la théologie au scolasticat autrichien d'Innsbrück (Autriche) où il collabore à la revue Zeitschrift für katholische Theologie[7]. Il y est ordonné prêtre quelques jours avant la déclaration de guerre de l’Autriche à la Serbie (28 juillet 1914) et parvient à rentrer en France pour prendre du service.

En , il apprend la mort de son cousin germain Jacques Berlier de Vauplane, mort pour la France[Note 2] puis en de son autre cousin germain Robert Berlier de Vauplane, mort pour la France[Note 3].

D'abord brancardier, il est ensuite aumônier militaire dans l'infanterie coloniale, au 24e régiment et au 43e[11]. Son dévouement marque fortement ses camarades : « « En gare de Sainte-Menehould, j'ai entendu deux soldats du 24e colonial[Note 4] causer de leur aumônier, le P. de Vauplane. « Tu l'as bien vu, comme il marchait sur le parapet pour ramener les “types”. Il est épatant. Et puis, il nous tirait par le bras pour nous aider à sortir des tranchées… Ce qu'ils sont tout de même chic, ces curés ! »[12]. Il est grièvement blessé le à Main de Massiges où une artère sectionnée le rendît boiteux pour la vie, puis regagne le front où il est victime, en 1917 d'une attaque par les gaz[4]. Compte tenu de sa bravoure, il est fait chevalier de l'Ordre de la Légion d'Honneur pour prendre rang le , avec citation à l'ordre de l'armée « aumônier (territorial) au groupe de brancardiers d'une division d'infanterie coloniale : bien que classé dans le service auxiliaire, puis réformé au cours de la guerre, a volontairement repris du service. Grièvement blessé, le , en relevant un officier tombé sur le champ de bataille, est revenu reprendre sa place au front à peine guéri. S'est dépensé sans compter avec une activité et un courage inépuisables, apportant à tous et dans les circonstances les plus critiques, le concours de son ministère. S'est particulièrement distingué au cours des opérations sur la Suippe, du 5 au 12 octobre, par sa vaillance et sa charité inlassable envers les blessés »[13]. Il exerce son ministère sur le front avec comme de nombreux autres jésuites engagés dans la Grande Guerre qu'il a côtoyé[14]. Hors des combats, il prêchait, donnait des leçons de latins et rendait mille et un services. Dans une lettre à sa famille, il écrivait : « j'assiste à un perpétuel miracle de la grâce… Des âmes s'élevant très haut, d'autres se purifiant... ah ! qu'ils sont beaux mes petits Français et que je les aime. »

Après l'armistice, il termine sa théologie en Angleterre, fait son 'troisième an' en Belgique. Il rejoint ensuite Paris où il est aumônier de la conférence Laënnec, au milieu des étudiants en médecine, externes, internes et patrons ; il s'intéresse alors à la physiologie[4]. Le journal La Croix écrit à son propos :

« Polyglotte et mathématicien de valeur, le père de Vauplane est aussi un lettré et un grand éducateur ayant séjourné longtemps dans divers pays étrangers, il s'est initié de près à toutes les méthodes éducatives en usage en Europe[15]. »

Considéré comme l'un des disciples du père Pierre Olivaint[16], « original, décidé, possédant à un degré rare le sens de l'autorité, plus ami des hommes que des livres »[4], il est nommé recteur des collèges jésuites parisiens de la rue de Madrid[17] et de la rue Franklin (lycée Saint-Louis-de-Gonzague[18]), puis recteur de l'école Sainte-Geneviève de Versailles, y exerçant une influence sur de nombreux élèves, comme celui qui deviendra son confrère, le père Émile Plankaert, un 'Juste parmi les nations' et Michel Poniatowski[19] ou encore le général Robert Aubinière[20].

Recteur du Lycée Saint-Louis-de-Gonzague (dit 'Collège de Franklin'), il est à l'origine du projet « Super Franklin » qui consista à détruire l’essentiel des vieux petits bâtiments existants et à faire construire le grand bâtiment, qui porte maintenant son nom. Ce bâtiment, construit en béton armé, inclut sur trois étages la grande chapelle. Cette chapelle est un vaste édifice comprenant notamment la fresque d’Henri de Maistre représentant La Vie de saint Louis de Gonzague[21]. Le bâtiment fut inauguré et béni par le cardinal Jean Verdier en 1935[22],[23].

Après la guerre, il continue de s'investir dans le monde militaire[24], en particulier comme aumônier de l'École spéciale militaire de Saint-Cyr[Note 5],[26], il exerce en même temps son apostolat, par des réunions et des conférences, en Allemagne et en Autriche[27]. « Fidèle à sa tâche d'éducateur, il prenait une place décisive dans les congrès de l'enseignement […] maniant couramment l'allemand et l'anglais […] il étonnait, tant par l'indépendance sereine de ses idées que par la maîtrise de la langue qu'il maniait[4]. »

Le , usé prématurément par ses blessures et son importante activité, le père de Vauplane est immobilisé par une terrible maladie dont il meurt le , jour anniversaire de son ordination sacerdotale[4]. Le , La Croix lui consacre une longue notice qui commence comme suit :

« Le P. de Vauplane est mort. À peine les journaux eurent-ils diffusé la triste nouvelle que de tous les coins de France affluèrent, de cent postes coloniaux, de bien des villes étrangères, accoururent non pas de banales condoléances, de laconiques télégrammes de sympathie, mais des témoignages émouvants de peine personnelle, de reconnaissance et de fidélité[4]. »

Le Figaro lui consacre une nécrologie le décrivant comme suit : " Haut et mince, pâle et blanc, fin de partout, le visage éclairé par le beau visage de ses yeux clairs, le P. François de Vauplane laisse à tous ceux qui l'ont connu le souvenir d'un homme qui savait tempérer ce que sa nature avait gardé de trop entier et de trop altier par une courtoisie et une bonté sans égales"[28].

Distinctions[modifier | modifier le code]

François Berlier de Vauplane est chevalier de l'ordre national de la Légion d'honneur[3] et titulaire de la croix de guerre 1914-1918[4].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Hervé Berlier de Vauplane est l'un des quatre fils d'Henri, le frère de son père. Hervé, né en 1893, entre dans la Compagnie de Jésus le , il séjourne au Caire de 1914 à 1915, est nommé prêtre du diocèse de Marseille et meurt à l'âge de 30 ans à Aix-en-Provence le des suites de ses blessures dues à une attaque au gaz durant la Première Guerre mondiale[5],[6].
  2. Jacques Berlier de Vauplane est l'un des quatre fils d'Henri, le frère de son père. Jacques, né en 1885, ancien élève de l'école Sainte-Geneviève et de l'École spéciale militaire de Saint-Cyr, lieutenant au 7e cuirassiers, est mort pour la France, tué à l'ennemi à Sailly (Nord) le [8],[9].
  3. Robert Berlier de Vauplane est l'un des quatre fils d'Henri, le frère de son père. Robert, né en 1896, est engagé volontaire, maréchal des logis au 19e régiment d'artillerie de campagne. Titulaire de la médaille militaire, de la croix de guerre avec étoile, il participe à 18 ans à la bataille de Verdun. Incorporé au corps expéditionnaire français à Salonique, il est torpillé à son retour en France sur le transport des troupes Sontay alors qu'il se rendait à l'École d'artillerie de Fontainebleau[10].
  4. Le « 24e colonial » est le 24e régiment d'infanterie coloniale.
  5. Au sanctuaire du Pavillon pontifical, la messe des Saint-Cyriens […] a été dite ce matin par le R. P. de Vauplane, ancien aumônier du corps colonial, chevalier de la Légion d'honneur. Le sanctuaire semblait trop petit pour contenir la nombreuse assistance des fidèles, au premier rang de laquelle on remarquait la présence du général et de Mme Weygand. Les saint-cyriens étaient groupés autour de l'autel. Au cours de l'office, le R. P. de Vauplane leur adressa une allocution, dans laquelle il montra quel rôle considérable à la fois d'éducateurs et d'exemple ils étaient appelés à jouer dans la société. Il les exhorta à cette force morale qui, seule, permet non seulement les grandes actions, mais l'action. Enfin, expliquant la cérémonie de la bénédiction des sabres qui allait se dérouler, il montra l'armée poursuivant la tradition de la chevalerie. Alors, les saint-cyriens, présentant leurs sabres, le R. P. de Vauplane prononça la formule spéciale de la bénédiction des armées et les aspergea d'eau bénite […][25].

Références[modifier | modifier le code]

  1. Acte de décès (avec date et lieu de naissance) à Versailles, n° 667, vue 113/234.
  2. (BNF 10066135)
  3. a et b « Cote 19800035/845/96761 », base Léonore, ministère français de la Culture
  4. a b c d e f g et h L. G., « Le R.P François de Vauplane », La Croix,‎ (lire en ligne).
  5. Les Prêtres du diocèse de Marseille au XIXe siècle, [lire en ligne].
  6. Descendance Berlier de Vauplane.
  7. (all) « Zeitschrift für katholische Theologie », sur jstor.org,
  8. Historique du 7e régiment de cuirassiers, 1914-1918, Service historique de la Défense, 2011-321628, [lire en ligne].
  9. Jacques Marie Amable André Berlier de Vauplane 1914-1918
  10. Morts pour la France, publications de La Fare, Paris, 1921, p. 942, [lire en ligne].
  11. « Les hommes du 43e RIC de 1914 à 1919 », sur le site de l'histoire du 43e régiment d'infanterie coloniale (consulté le ).
  12. Frédéric Rouvier, L’Église de France pendant la Grande Guerre, Paris, Perrin, , 552 p. (lire en ligne), p. 405 et 408.
  13. Journal officiel de la République française, édition du , p. 3361-3362, [lire en ligne].
  14. A. Verrièle, Les séminaristes de Saint-Sulpice morts au champ d'honneur 1914 - 1918, Limoges, Bureau des élèves des anciens de Saint Sulpice, , p. 391
  15. Jean Rollet, « Faut-il réformer l'enseignement secondaire ? : I. Une enquête impartiale — Son but — Nos sources d'information », La Croix,‎ , p.3 (lire en ligne).
  16. compagnie de Jésus, « Pour le centenaire du père Olivaint », Etudes, no 149,‎ , p. 637
  17. Un jésuite centenaire début 2006 : le père Émile Planckaert, sur le site des Jésuites, Province de France, [lire en ligne].
  18. Joseph Burnichon, La Compagnie de Jésus en France, histoire d'un siècle : 1814 - 1914, t. IV, Paris, Gabriel Beauchesne, , p. 93.
  19. Michel Poniatowski, Mémoires, t1, Paris, Plon, , 369 p. (ISBN 2-259-18517-7), p. 26
  20. André Lebeau, Le général Robert Aubinière : propos d'un des pères de la conquête spatiale, Paris, Lharmattan, , 206 p. (ISBN 978-2-296-05193-5), p.15.
  21. « Chapelle du collège Saint-Louis-de-Gonzague », sur le site de l'Observatoire du patrimoine religieux (consulté le ).
  22. Franklin, 100 ans d’éducation pour l’avenir, Gallimard, 1996.
  23. « Un magnifique collège libre vient d'être béni à Paris par S. Em. le Cardinal Verdier », La Croix, no 16157,‎ , p. 2 (lire en ligne).
  24. « Pêle-mêle », L'Ouest-Eclair, no 14.249,‎ , p.6
  25. Les saint-cyriens au sanctuaire du pavillon pontifical, Paris, , in L'Express du Midi, édition du , p. , [lire en ligne].
  26. « Extrait du Journal Le FIGARO du 26 décembre 1934 », sur le site parfgeneatoponyme (consulté le ).
  27. Compagnie de Jésus, « Premier congrès international des catéchistes à Vienne », Etudes, no 133,‎ , p. 519
  28. « Le R.P François de Vauplane », Le Figaro,‎ , p. 2 (lire en ligne)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Livre d'or de l’École Sainte Geneviève, tome II, 1924-1954, page 6.
  • Anciens élèves célèbres in Annuaire des anciens élèves de l'école Sainte-Geneviève, édition 2011.
  • Marie-Claude Flageat, Les jésuites dans la Grande Guerre : témoins, victimes, héros, apôtres, Éditions du Cerf, 2008, 597 p.
  • Études Religieuses, historiques et littéraires, J. Lanier et Cie, 1912, 24 p.
  • Hubert de Vauplane, Deux jésuites dans la grande guerre, Jourdan éd., 2020, ISBN, 2874666114

Liens externes[modifier | modifier le code]